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Migration- Ces recommandations fortes de la Société civile l’Etat du Sénégal

Migration- Ces recommandations fortes de la Société civile l'Etat du Sénégal

Africaleadnews – (Sénégal) Le cadre des organisations de la société civile sur la gouvernance migratoire centrée sur les défis et priorités du Sénégal, appuyé par la Fondation Heinrich Böll et Osiwa, a organisé ce lundi un point de presse à Dakar. A cette occasion, la note contributive a été présentée. Elle renferme deux propositions faites à l’État qui fera le choix du modèle le plus adapté et le plus en adéquation avec ses choix institutionnels et administratifs.

La politique migratoire à repenser doit permettre de réfléchir sur le cadre institutionnel le plus optimal pour le Sénégal. Plusieurs pistes peuvent être explorées pour la mise en place du modèle le plus adapté par rapport à la vision que l’État compte avoir mais aussi en fonction des priorités qu’il souhaite mettre en exergue et des ressources qui seront mobilisées pour la réalisation de la politique migratoire.

Deux propositions à l’État qui fera le choix du modèle le plus adapté et le plus en adéquation avec ses choix institutionnels et administratifs : D’abord, en cas de rétablissement du poste de premier ministre, la primature pourrait ainsi devenir l’instance de coordination de l’action gouvernementale dans le domaine migratoire. Cette structure servirait ainsi de lieu de coordination des interventions et elle aura aussi pour mandat de fournir des conseils avisés au gouvernement pour des interventions appropriées et efficaces dans le domaine
migratoire.

Ensuite, la mise sur pied d’un ministère des Sénégalais de l’extérieur et des Affaires de la migration. La création d’une telle structure avec une feuille de route clairement établie, des responsabilités institutionnelles bien dénies et les moyens conséquents serait un pas très important en matière de gouvernance des questions migratoires. Créer un ministère des Sénégalais de l’extérieur et des Affaires de la migration serait à la hauteur du poids démographique et de la contribution socio-économique de la diaspora et des étrangers installés au Sénégal.

La contribution de la Société Civile a pour objectif d’aider à l’élaboration d’une politique nationale de la migration en phase avec les engagements internationaux auxquels notre pays a souscrit.

Pour rappel, le document est issu de la synthèse de la note contributive produite à la suite d’une réflexion menée par plusieurs organisations de la société civile (OSC)1 avec l’accompagnement de la Fondation Heinrich Böll Sénégal. Ces OSC sont arrivées à la conclusion que le Sénégal devrait adopter un cadre de gouvernance migratoire axé sur les enjeux les plus cruciaux de l’heure mais surtout arrimé à ses intérêts et
priorités.

La note contributive a fait l’objet d’un atelier de concertation organisé les 23 et 24 novembre 2021 à Dakar au cours duquel d’autres membres de la société civile ont pu l’enrichir. Les OSC ayant participé au processus de réflexion sont motivées par le désir d’accompagner l’État dans ses initiatives en vue d’une « meilleure gouvernance migratoire ».

Cette dernière est d’ailleurs l’objectif 8 (OS8) de l’Axe « Capital humain, protection sociale et développement durable » du Plan d’Actions prioritaires 2 Ajusté et Accéléré (PAP2A) pour la relance de l’économie
2019 – 20233 .

Il est aujourd’hui impérieux pour les pouvoirs publics d’élaborer une stratégie cohérente en matière de gouvernance migratoire le tout en conformité avec les engagements internationaux du Sénégal. Elle doit également être alignée sur les principes des textes politiques, institutionnels et juridiques adoptés par les
instances africaines dont le Sénégal fait partie4.

Sur un diagnostic des défis migratoires et une bonne connaissance des tendances et modèles migratoires tout en étant arrimée au quadruple statut du Sénégal comme pays de départ, de transit, d’accueil et de retour. La politique migratoire nationale, en plus d’être axée sur les priorités du Sénégal, devrait aussi prendre en compte les défis liés au portage institutionnel et à l’ancrage administratif de la thématique migratoire. Toutefois, la définition du contenu de la politique migratoire et l’identificationdes axes stratégiques autour desquels elle doit être bâtie devraient reposer sur une vision qui affirme le rôle des migrations dans le développement du
Sénégal.

 Recommandations en matière de politiques sectorielles
Politique de la mobilité : Ratifier et mettre en application le protocole de l’Union Africaine sur la
libre-circulation et contribuer à son adoption et son application par les autres pays. Assurer une meilleure prise en compte des enjeux et dés liés à l’immigration au Sénégal ; Mettre en place des stratégies ecaces en matière d’emploi des jeunes par la promotion de l’entreprenariat dans des secteurs innovants, la définition de
stratégies et de modalités de formation plus en articulation avec les caractéristiques du marché du travail an de proposer des alternatives adéquates et pérennes à l’émigration irrégulière ; Pendre en en compte la question du devenir des acteur.trices de la pêche àtravers une prise en compte des externalités négatives induites par la future exploitation du pétrole et du gaz sur ce secteur et les éventuelles répercussions de
cette situation sur les dynamiques migratoires, notamment sur les mobilités internes.
Migration de travail et pour études :
Ratifier et mettre en application les conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur la migration de la main-d’œuvre, tout en adaptant les lois et règlements du Sénégal aux normes internationales du travail ; Mettre en œuvre des mécanismes de promotion et d’encadrement de la migration circulaire mais aussi des dispositifs et outils de gestion de la migration de main d’œuvre en direction des pays demandeurs aujourd’hui de ce type de migration ;  Initier des actions visant à renforcer la place du Sénégal comme hub
académique à travers la création d’incitatifs et de mécanismes permettant de renforcer les capacités des établissements d’enseignement supérieur privés comme publics pour être plus compétitifs sur le marché de la mobilité pour études ; Initier des actions de valorisation des compétences disponibles au sein de la
diaspora sénégalaise par le renforcement des initiatives en cours dans ce domaine et la mise en place de dispositifs innovants pour attirer les talents de la diaspora.
Migrations de retour 

Veiller à ce que les accords sur le retour et la réadmission ne compromettent pas la liberté de circulation des personnes ; S’assurer que le retour s’eectue de manière humaine et dans le respect de la dignité et de la protection en plus d’être fondé sur le principe de non violation des droits des migrant.es, notamment en cas de retour obligatoire ; Accorder une attention spéciale à la santé mentale des migrant.es de retour à
travers la mise en place d’actions pour leur accompagnement psychologique et leur
réintégration sociale ; Mettre en œuvre des programmes de réinsertion des migrant.es de retour et
les aligner sur les stratégies de développement aux échelles nationale et territoriale
tout en les adossant aux besoins et aux caractéristiques des communautés dans
lesquelles les migrant.es reviennent ;
Renforcer la bonne gouvernance dans la gestion des fonds destinés à l’accompagnement au retour par le suivi des projets et programmes de réinsertion à travers une évaluation périodique des actions an de promouvoir les bonnes pratiques et de corriger les défaillances.
Migration irrégulière, trafic de migrant.es et traite d’êtres humains :
Impliquer les organisations de la société civile dans les réponses au trafic de migrant.es, en particulier en permettant leur contribution aux mesures de protection et d’assistance, ainsi qu’à l’accompagnement et le soutien aux migrant.es victimes de trafic ; Lutter contre l’exploitation des enfants, des femmes et des lles en réduisant leur exposition à la vulnérabilité socio-économique qui est un terreau propice au
développement au trafic et à la traite dont ils/elle sont victime, intégrer la dimension migratoire, surtout les enjeux liés à la traite et au trafic dans les politiques nationales en matière de protection de l’enfance,
d’autonomisation des femmes, de genre et d’inclusion ;
Élaborer des politiques de lutte contre la migration irrégulière, de trafic de migrant.es et la traite en collaboration avec les parties prenantes concernées, notamment les organisations de la société civile ;
Mettre en place des mécanismes suffisants de protection et d’assistance aux victimes de la traite par l’intermédiaire d’un système faible de poursuites aux niveaux policier et judiciaire ; des mécanismes de coordination institutionnelle à plusieurs niveaux.
Migrations internes :

Promouvoir la production de données et de connaissances sur les migrations internes an de faciliter une meilleure connaissance des enjeux et dés liés aux migrations internes, de leurs caractéristiques intrinsèques et de leurs liens avec les politiques d’aménagement et de développement territorial ;
Prendre en compte la gestion des migrations internes dans les politiques publiques notamment dans les politiques d’aménagement et de développement territorial.

Recommandations et propositions concernant les questions transversales
Promouvoir la mobilisation et l’utilisation ecaces des fonds de la diaspora pour l’investissement et le développement des secteurs public et privé ; Mettre sur pied des mécanismes d’analyse des eets positifs et négatifs de la migration sur les dynamiques de développement territorial ; Mettre sur pied des mécanismes, des politiques et programmes orientés vers la canalisation des transferts de fonds vers des projets productifs ;
Accorder une attention spécique aux femmes migrantes en vue de faciliter leur accès à des formations d’initiation financière et aux systèmes officiels d’envoi de fonds, d’accès aux services bancaires et des opportunités en matière d’investissement.

 Données et recherches sur les migrations :
 

Mettre en œuvre des enquêtes nationales spéciques sur les migrations sur la base d’une démarche permettant d’établir une synergie entre les structures-clefs en matière de production et d’analyse de données migratoires, au premier rang desquelles l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD), les
structures de recherches et les entités institutionnelles concernées par la migration au Sénégal ;  Prévoir un module plus accès sur les migrations lors du recensement général de la population et de l’habitat de 2023 an d’obtenir des données exhaustives sur les multiples dimensions des migrations ; Réaliser sur une base régulière des enquêtes et des études permettant de générer des données statistiques sur divers enjeux migratoires en privilégiant une vision holistique de la migration, établir un cadre de dialogue entre les structures productrices de données sur la migration à travers l’organisation d’ateliers d’échange et de partage d’expériences entre les acteur.trices impliqué.es dans la production de données ;
Renforcer les capacités humaines et logistiques des services administratifs producteurs de données à caractère migratoire5 ; Créer un observatoire institutionnel des migrations ayant des responsabilités
larges et doté de moyens humains, techniques et logistiques pour réussir sa mission. Un mandat institutionnel clair et des mécanismes de partenariat aux échelles nationale et internationale avec des structures de recherche, des bailleurs de fonds et des bases de données internationales devraient lui être donnés pour le
positionner comme un pôle de référence en matière de production de données et de connaissances sur les migrations au Sénégal ;
Mettre à jour la stratégie nationale de développement de la statistique en portant une attention particulière à la migration à travers la mise en place d’un groupe de travail sur les données migratoires qui identiera les acteur.trices, les moyens et les stratégies pour la prise en compte des migrations dans le système
statistique national.

  Migration et genre 
Promouvoir des recherches an de mieux comprendre la dynamique sexo-spécique des migrations, an de permettre l’identification de réponses appropriées aux inégalités de genre dans le domaine migratoire ;
Renforcer des réponses aux besoins particuliers des femmes et des filles migrantes, en particulier en veillant à ce que leurs besoins en matière de santé, les droits du travail et les droits humains soient respectés. Une perspective sexo-spécifique devrait être intégrée dans toutes les politiques, stratégies et programmes de gestion des migrations nationales et régionales, en reconnaissant le rôle de la femme dans les migrations, et favorisant son autonomisation et son leadership ; Garantir une meilleure représentativité politique des Sénégalaises de l’extérieur (femmes députées de la diaspora, comme membres du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE), du Haut Conseil pour les Collectivités Territoriales (HCCT), etc.) ;
Introduire des réformes dans le Code de la famille an de tenir compte des mutations dans les rôles des femmes migrantes an d’intégrer les réalités des familles transnationales ;  Renforcer les capacités des institutions nationales en charge des questions de migration sur la thématique genre, l’amélioration de la sensibilisation aux conditions de vie et de travail dans les pays de destination des migrantes et la
promotion d’une politique spécifique d’insertion dans les pays d’accueil et de réinsertion des femmes migrantes de retour au Sénégal ;

Produire des études et des rapports qui mettent l’accent sur la féminisation de la migration et la dimension genre des politiques migratoires et qui font ressortir la diversité des prols, des itinéraires et les dynamiques d’intégration des femmes migrantes et des autres groupes vulnérables en contexte migratoire (enfants,
personnes handicapées, personnes âgées, etc.).

 Migration des enfants, des adolescents et des jeunes :
Enchâsser les droits des enfants, des adolescents et des jeunes migrant.es dans les lois sénégalaises tels que dénis dans les instruments juridiques africains et internationaux de la protection des enfants et des jeunes (H/F), notamment la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, la Charte africaine de la
jeunesse, la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et ses deux Protocoles, ainsi que la Convention 182 de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants ;
Veiller à la prise en compte des enfants, des adolescent.es et des jeunes migrant.es dans les politiques sectorielles dans le domaine de l’éducation, de la santé, de la justice, de l’emploi, de genre, d’aménagement du territoire, de sécurité, de famille, etc. ;
Effectuer une mise à jour des documents stratégiques en matière de protection de l’enfance et veiller à la prise en compte des migrations des enfants, des adolescents et des jeunes.

 Migration et personnes âgées :
Élaborer des politiques adaptées face au vieillissement des migrant.es dans les pays d’accueil et des réponses articulées à leurs besoins économiques, sociaux, spirituels, etc. ; Mettre en place des dispositifs d’accompagnement et de prise en charge psycho-sociale pour faciliter la réintégration sociale des migrant.es âgés de retour ; assurer la portabilité des droits sociaux (migration circulaire, pensions de
retraite, conventions en matière de retraite, etc.) ; intégrer dans les dispositifs d’accompagnement des migrant.es la prise en charge de la mort en contexte migratoire (rapatriement, régimes juridiques
concernant l’héritage, etc.) ; encourager et encadrer l’émergence autour d’une ore de services pour des
migrant.es retraités et des étrangers retraités s’installant au Sénégal (immobilier,
soins de santé, prestation de services, sécurité, etc.).
Migration et santé :
Prendre en compte des analyses de situation et des évaluations des besoins de la santé des migrant.es à des plans de planification, à travers la participation et l’implication des plus vulnérables ; Assurer un ensemble minimal de services de santé pour les réfugiés et les personnes déplacées, y compris la prévention, le traitement et l’éducation sanitaire, en tenant particulièrement compte des besoins des groupes vulnérables ;
Élaborer de stratégies pour permettre le dépistage et le traitement aux points d’entrée/postes frontaliers ;
Mettre en place une stratégie des épidémies, des épizooties et des endémies quand on sait que le contexte de dérèglement climatique a tendance à favoriser leur récurrence ; Assurer une imbrication et mise en cohérence entre les politiques migratoires et les politiques sanitaires ;  Veiller à une prise en compte des enjeux liés à la migration dans les documents de référence et les politiques et programmes en matière de santé
publique.
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