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Babacar Ndaw Faye, journaliste : “Sadio Mané s’est fait une place parmi les légendes du monde et ce n’est pas fini”
Babacar Ndaw Faye, journaliste : “Sadio Mané s’est fait une place parmi les légendes du monde et ce n’est pas fini”
Journaliste et chef du service des Sports du groupe E-Media, Babacar Ndaw Faye place Sadio Mané parmi les grandes légendes du foot mondial. Considérant le joueur du Bayern comme, d’ores et déjà, le plus grand joueur sénégalais, il estime, par ailleurs, que Mané a le potentiel pour aller beaucoup plus haut.
Hier a été dévoilé le palmarès du Ballon d’Or 2022. Quelle est votre appréciation globale ?
C’était visiblement une belle cérémonie. Avec beaucoup de lauréats. Sur celui qui retient plus d’attention, c’est à dire le Ballon d’Or masculin, je remarque que le hasard a fait que le podium est une véritable victoire pour le football que j’aime, qui symbolise l’altruisme, avec des joueurs, Benzema, Mané et De Bruyne qui aiment se mettre à l’ombre pour faire briller leurs équipes respectives. C’est l’une des qualités les plus rares dans le football moderne et je me réjouis de voir ce type de joueurs récompensés même si, je l’ai souvent dit ici et ailleurs, je n’aime pas véritablement ce trophée, ce qu’il représente, la place qu’il prend globalement dans le football moderne et la perception qu’il finit par donner sur les performances.
“Le classement de Sadio Mané est anecdotique à mes yeux dans une année où il nous a fait vivre le bonheur d’être champion d’Afrique”
Sadio Mané a fini deuxième, et a aussi remporté le premier prix Socrates. Vous attendiez-vous à une soirée aussi prolifique pour le joueur du Bayern ?
J’avais dit dans un précédent entretien avec Seneweb que Sadio Mané n’avait pas besoin de Ballon d’Or pour avoir la valeur qu’il a aujourd’hui. Qu’il n’avait pas besoin du Ballon d’Or pour être une légende. Je refuse toujours ce diktat du Ballon d’Or qui devrait valider ou invalider les légendes. C’est valable pour Benzema. Le Ballon d’Or ne peut être qu’une cerise sur le gâteau. Donc le classement de Sadio Mané est anecdotique à mes yeux dans une année où il nous a fait vivre le bonheur d’être champion d’Afrique. C’est inestimable. Hier Ronaldo était 20e, Messi hors du classement. Si dans un mois le Portugal ou l’Argentine est sacré champion du monde, tout le monde oublie ce classement. Je préfère toujours que l’essentiel se fasse sur le plan collectif et l’échéance la plus importante pour Sadio Mané, c’est la Coupe du monde. Je pense qu’il en est conscient. Et à propos du prix Socrates, en tant que Sénégalais, je suis heureux de voir Sadio Mané heureux, heureux de voir le monde saluer l’importance de ses œuvres caritatives sues, car il y a énormément d’actes de grande portée qu’il pose sans que cela ne s’ébruite et c’est tout à son honneur.
“George Weah n’est pas le meilleur footballeur africain de l’histoire parce que je ne conçois vraiment pas que le Ballon d’Or soit le référentiel pour un tel classement”
En terminant deuxième, il est le premier joueur africain à figurer sur le podium depuis George Weah. Dans l’histoire du football africain où classeriez-vous Sadio Mané parmi des légendes telles que Weah, Eto’o, Drogba, etc ?*
Il est très difficile voire impossible de classer des joueurs sur des époques différentes, avec beaucoup de paramètres à prendre en compte. Par exemple pour moi, George Weah n’est pas le meilleur footballeur africain de l’histoire parce que je ne conçois vraiment pas que le Ballon d’Or soit le référentiel pour un tel classement. La carrière de Mané est loin d’être finie et il lui reste encore des trophées à cueillir. Mais je suis persuadée que s’il décidait d’arrêter aujourd’hui, il serait tout de même une légende mondiale du football. Comme Eto’o, comme Thierry Henry, comme Benzema, comme Yaya Touré ou Drogba etc. Les classements, c’est vraiment chacun selon ses influences et son ressenti sur un moment. J’ai adoré plus que tout la génération du Nigeria des années 90 qui m’a beaucoup influencé. Eto’o est une icône mondiale qui n’a absolument rien à envier à n’importe quel lauréat du Ballon d’Or alors qu’il n’a jamais été sur le podium. Yaya Touré est l’un des meilleurs milieux de l’histoire du football, l’un des plus complets qu’il m’ait été donné à voir jouer. On peut en citer des dizaines, des Aboutrika, des Kalusha Bwalya, des Abedi Pelé, Mohamed Salah, Adebayor, Diouf, Madjer, Beloumi, Salif Keita… L’Afrique a connu beaucoup de joueurs de très grande classe qui n’ont absolument rien à envier à d’autres. La seule certitude, c’est que Sadio Mané s’est fait une grande place parmi ces légendes du monde et ce n’est pas fini.
“Sadio Mané atteint un niveau en club qu’aucun autre sénégalais n’a atteint. Il a été le plus important dans notre plus grand accomplissement, il est le meilleur buteur de l’histoire de la sélection, il va bientôt être le plus capé…”
Sur le plan purement sénégalais, Mané est-il déjà le GOAT national ?*
Il n’y a plus de doute possible à ce niveau. Il a atteint un niveau en club qu’aucun autre n’a atteint. Il a été le plus important dans notre plus grand accomplissement, il est le meilleur buteur de l’histoire de la sélection, il va bientôt être le plus capé en nombre de sélections, il n’y a pas un seul aspect sur lequel il peut aujourd’hui être en concurrence avec qui que ce soit. Maintenant, sur des aspects purement subjectifs, quelqu’un peut préférer un autre. Je respecterai toujours celui qui me dira avoir été davantage émerveillé par Baba Touré ou par le génie inconnu de son quartier qui n’a pas eu la chance de percer. C’est le charme du football.
Jusqu’où peut-il encore aller. Il a connu un début de saison mitigé : est-il en fin de cycle ou peut-il encore aller beaucoup plus loin que ce qu’il a déjà fait ?
Jusqu’au sommet du monde. C’est en tout cas ce que je lui souhaite car c’est tout simplement le meilleur accomplissement possible et imaginable pour le football. Il a encore potentiellement la possibilité de jouer 2 éditions de Coupe du monde et il a également la chance d’être dans la meilleure génération, en qualité individuelle, de l’histoire du Sénégal. Mais même sur la génération qui arrive derrière, il y a de quoi nourrir de grands espoirs et il peut encore les accompagner. Ça fait qu’on peut continuer à être exigeant envers lui. On est resté longtemps sans gagner, aujourd’hui qu’on connaît le chemin, il ne faut pas se priver…